Aujourd'hui il y a encore peu de gens qui connaissent plus d'espèces d'oiseaux que de marques de voitures...
Pourtant l'ibis rouge est quasiment connu de tous en Guyane Française !
Cette notoriété est dûe à ses couleurs flamboyantes, mais c'est aussi la cause de sa funeste histoire.
Alors que dans les années 1940-1950, les mangroves des estuaires et certaines plages guyanaises à marées basses étaient teintées d'un rouge flamboyant par l'abondance des Ibis rouge, les décenies qui suivirent furent catastrophiques...
A cause d'un rapport de plus en plus distendu avec le vivant, l'abondance des Ibis ne se faisait plus remarquer dans les milieux naturels mais sur les étals de la majorité des marchés guyanais.
Considérés comme un gibier, on les retrouvait à la carte des spécialités locales au restaurant pour les touristes, dans les marmites des locaux et dans les maisons et les valises en décoration, l'artisanat et ses acheteurs raffolant de ces plumes de couleurs vives, aux côtés de celles des Aras et des Aigrettes.
En 1976 une étude à montré qu'une centaine de femmes de Sinnamary vivait, plus ou moins ponctuellement, du commerce de plumes, notamment par la confection de fleurs, et qu'il était nécessaire pour cela d'avoir environ un millier d'Ibis rouge par an, uniquement pour ce lieu et cette activité.
Des plaisirs visuels et gustatifs sans mesure qui vidèrent litteralement le littoral guyanais de ces oiseaux.
Ainsi, les populations s'amenuisent jusqu'à la triste année 1983 où il n'y a plus aucun couple nicheur recensé.
Ce drame n'est pas vécu qu'en Guyane Française mais également chez ses voisins et sur l'ensemble de son aire de répartition (Brésil, Suriname, Guyana, Venezuela, Colombie, Trinidad et Tobago ...)
👉L'heure de "raviver les braises du vivant"
En référence au livre de Baptiste Morizot, il n'est pas trop tard pour agir à partir du moment où les espèces n'ont pas encore disparues, il suffit de changer notre rapport au vivant.
Ainsi, dans les années qui suivirent, il fût décidé dans plusieurs pays d'enrayer ce déclin en protégeant cette magnifique espèce.
Arretés ministériels, suppression de la liste des espèces chassables, inscription à l'annexe II de la Convention de Washington en 1987, ou encore prise de mesure drastique comme au Surinam où l'emprisonnement attend les braconniers qui continuent la chasse de l'ibis rouge.
Chaque pays prend des décisions plus ou moins tardivement et plus ou moins efficaces, notamment par les moyens d'application des nouvelles mesures. Mais tous sont confrontés à des braconnages qui se maintiennent du à l'ingéniosité et à la discrétion des braconniers, au trop rares contrôles des autorités, et surtout à une évolution lente dans notre conception, valorisation et respect du reste de la vie qui nous entoure.
Et ce, malgré les alertes croissantes des scientifiques sur la chute des populations et l'urgence de cesser la pression de chasse.
👉Aujourd'hui les colonies d'Ibis rouge de Guyane se portent mieux, notamment grâce à linstauration de leur statut d'espèce protégé grâce aux associations de protection de la nature (Sepanguy, GEPOG, ..) et aux autorités.
La pression de chasse diminue et certains locaux et dirigeants ont compris qu'une alternative avec le tourisme était également une des manières de protéger ces oiseaux.
Mais leurs populations restent fragiles et doivent faire face à d'autres défis en parallèle : contamination de l'eau par l'orpaillage et les activités humaines et donc contamination des ressources en nourriture, exploitation du réseau fluvial et donc dérangement dans les estuaires des zones de nourrissage et de nidification, destruction/réduction et fragmentation de leur habitat laissant entrevoir une raréfaction de leurs ressources alimentaires, et un braconnage bien sûr qui persiste dans l'ombre.
Mais le plus grand défi auquels ils doivent faire face reste sans doute le manque de connaissance quand à l'état et au nombre de leur population par le grand public.
Ne devrait-on pas, avant de chasser, de manger ou d'acheter un produit à issus d'une espèce animal, se demander d'abord si l'espèce est en diminution, en voie de disparition ou si elle est stable ou en augmentation ?
Encore une fois, tout n'est pas perdu, il s'agit simplement de changer notre rapport au vivant afin de le protéger efficacement.
Apprenons à connaître la vie autour de nous, sensibilisons, parlons autour de nos des problématiques et des solutions qui existent, et voyons la vie autour de nous fleurir à nouveau !
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